Ismaël Traoré, vous êtes âgé de 37 ans et vivez votre 17ème saison en professionnel. Quelle est votre formule magique ?
Ismaël Traoré : « Chaque joueur doit se fixer des objectifs et pour les atteindre, cela passe par le travail. À partir du moment où je suis salarié quelque part, je me dois d’être exigeant et de rendre la confiance que l’on me donne. Je n’ai pas envie de décevoir et j’ai toujours envie de progresser, de jouer et d’être le plus performant possible. »
Vous semblez également prendre extrêmement soin de votre corps. Quel rôle cela joue-t-il sur vos performances ?
I.T. : « À mon âge, je suis obligé de faire attention à mon corps et à l’écouter en permanence. Je sais plus ou moins ce que je dois faire afin de réduire les blessures. Par exemple, nous avons un appareil qui s’appelle le Biodex et qui me permet de prévenir les blessures au genou et qui m’évite les tendinites. Je sais que j’en ai besoin pour faire de l’excentrique. On m’a toujours dit qu’à un certain âge, j’aurais des blessures que je ne pourrais pas éviter, mais je me suis rendu compte qu’en étant assidu dans le renforcement musculaire, je parvenais à faire disparaître ou atténuer ces douleurs. »
Avez-vous d’autres exemples concrets ?
I.T. : « Je fais également très attention à mon alimentation. Ce n’est pas facile, mais j’essaie d’écouter les conseils que l’on me donne. Jacques Muller, notre kinésithérapeute, est très branché nutrition et il me donne quelques conseils, comme ne pas mélanger les féculents avec les protéines. Je sais aussi que lorsque je veux consommer de la viande, je dois uniquement des légumes en accompagnement. Il me conseille aussi de garder la notion de plaisir en mangeant ce que je veux le lendemain de match. Cela porte clairement ses fruits, car j’ai perdu du poids, et je me sens mieux sur le terrain. Le sommeil est également très important. Quand j’étais jeune, je me couchais à pas d’heure et j’étais en forme pour l’entraînement du lendemain. Aujourd’hui, ce n’est plus possible et je ne me couche donc jamais tard le soir. »
À quel moment avez-vous pris conscience de l’importance de prendre soin de son corps ?
I.T. : « J’ai toujours été sérieux dans le travail, mais il fût un temps, je n’avais pas cette rigueur dans ce qu’on appelle la préparation invisible. Nous n’étions pas aussi bien aidés dans le suivi de notre alimentation. Aujourd’hui, je me mets beaucoup plus de restriction. Par exemple, quand mes enfants veulent manger un fast food, je les emmène, mais je ne mange pas la même chose qu’eux. Je me dis que si je travaille en salle et que je fais autant d’efforts, ce n’est pas pour tout gâcher au niveau de l’alimentation. Il faut être un minimum cohérent. »
Est-ce que vous profitez de votre expérience pour distiller des conseils aux plus jeunes à ce sujet ?
I.T. : « La saison dernière, avec Habib (Maïga), nous avions dit aux jeunes que nous voulions voir tout le monde en salle de musculation avant chaque entraînement et qu’on ne voulait voir personne dans le vestiaire à rien faire sur son téléphone. C’est une habitude que tout le monde a prise. À force de voir les collègues bosser, ça donne envie à tout le monde. »
Au sein du vestiaire grenat, vous êtes apprécié par tout le monde et jouer un rôle de leader. Est-ce que cela vous tient à cœur ?
I.T. : « Beaucoup de personnes pensent que je ne souris jamais et que je suis une personne très froide. C’est ce que l’on pense lorsqu’on ne me connaît pas, mais quand on me voit quotidiennement, on se rend compte que j’aime beaucoup chambrer, taquiner et provoquer. À partir du moment où j’ai ce comportement, il y a des conséquences comme nous avons pu le voir en après match au Havre (rires). Nous sommes tous là pour la même cause, les mêmes objectifs, et il est très important d’être unis. Il n’y a pas de place pour les clans et pour les individualités surtout dans une équipe comme la nôtre. Il est important de montrer à tout le monde que nous devons tous tirer dans le même sens, c’est pour ça que j’essaie de mettre au maximum mes coéquipiers à l’aise. De mon côté, je suis aussi gagnant car ces jeunes m’aident et me poussent aussi à garder mon niveau et à continuer de progresser. »
En 2007, vous débutez en professionnel. À l’époque, était-ce aussi simple pour un jeune de se faire une place dans une équipe ?
I.T. : « À l’époque, tu arrivais en professionnel, tu ne rentrais même pas dans le vestiaire. Tu t’entraînais avec le groupe, mais tu attendais devant la porte du vestiaire. Est-ce que ça m’a perturbé de ne pas être aussi bien accueilli qu’un jeune aujourd’hui ? Je ne sais pas, mais en tout cas, ça m’a bien éduqué. C’est une motivation supplémentaire pour prouver et pouvoir entrer dans le vestiaire. Parfois, à l'entraînement, j’étais le seul jeune et je pouvais passer toute la séance à ne parler avec personne, car les anciens ne te calculaient pas. Ce sont des choses qui m’avait choquées, mais ça t’apprend le respect. Nous n’avons pas tous le même comportement face à ce genre de situation. Moi, j’ai bien réussi à le vivre, mais je ne suis pas sûr que ça soit le cas pour tout le monde. C’est aussi pour ça que j’essaie d’intégrer au maximum les jeunes, car nous devons tous tirer dans le même sens. Nous nous devons de mettre tout le monde dans les meilleures conditions pour espérer le meilleur résultat collectif possible. Un joueur, quand il est bien dans sa tête et se sent apprécié, c’est plus facile pour lui d’être bon sur le terrain. »
À l’aube de cette dernière rencontre de championnat face au PSG, quel regard portez-vous sur cette saison ?
I.T. : « Nous avons forcément des regrets car nous savons que nous avons raté quelques matches. Maintenant, il faut tourner la page et donner le meilleur de nous-même pour essayer de s’en sortir. Il y a quelques semaines, tout le monde nous enterrait et nous voyait finir dernier. Aujourd’hui, nous sommes encore là et nous verrons bien ce que l’avenir nous réserve. Nous allons tout faire pour faire plaisir à nos supporters, car quand on voit le comportement qu’ils peuvent avoir à Strasbourg malgré la déception, même s’il y a eu des périodes plus compliquées, ce sont des choses qui me touchent personnellement et me donnent envie de me battre davantage. »
Avec le recul, comment pouvez-vous expliquez les deux derniers revers en fin de rencontre ?
I.T. : « C’est vraiment rageant car nous avons l’impression de nous battre, nous n’abandonnons pas, mais il y a des faits de jeu qui ne tournent pas en notre faveur. Aujourd’hui, tout le monde est concerné du début jusqu’à la fin, mais il y a ce petit facteur qui fait que nous ne parvenons pas à prendre les trois points. Évidemment, c’est aussi de notre faute, car nous devons faire preuve de plus de caractère. »
Aujourd’hui, le FC Metz possède encore son destin entre ses pieds. Comment vivez-vous cette préparation de la dernière rencontre de championnat ?
I.T. : « Ces derniers mois, j’ai lu beaucoup de choses où on nous voyait déjà en Ligue 2. Quand j’ai vu ça, j’ai montré aux joueurs et nous avons tous eu envie de faire taire ces personnes. Nous avons été piqués dans notre orgueil, et nous ferons tout pour déjouer les pronostics, comme nous avons pu le faire l’an dernier, lorsque personne ne nous voyait monter. Cela ne sert à rien d’en parler pour le moment, il reste encore un match pour aller chercher les barrages. Cela reste une rencontre très excitante à préparer. »